Appel à com’ : Penser l’interdiscursivité

L’Association Lyonnaise des Étudiants Chercheurs en Sciences de l’Information et de la Communication (Alec-SIC) organise une journée d’étude le 14 janvier 2016.

Cette journée a vocation à interroger la notion d’interdiscursivité. Ce concept englobant, auquel les notions de « dialogisme » (BAKHTINE, 1970) et « intertextualité » (KRISTEVA, 1969 ; BARTHES, 1973) sont étroitement liées, est entendu comme l’analyse des zones de contact entre différents espaces discursifs (GARRIC et LONGHI, 2013). L’interdiscursivité pourrait être ainsi considérée comme « une notion générique de mise en relation de ce qui a été déjà dit quelle que soit la forme textuelle sous laquelle apparaît ce déjà dit » (CHARAUDEAU, 2006). Elle s’applique donc à une pluralité d’objets d’étude.

Par exemple, du point de vue de l’analyse des médias, partant du constat que les mots ne sont pas neutres mais toujours « habités », c’est-à-dire traversés par les dires des autres, l’interdiscursivité renvoie à la notion de « mémoire médiatique » (MOIRAND, 2007), le rôle du chercheur étant de repérer la « traçabilité » de ces mots et de remonter ces « fils interdiscursifs ».

Par ailleurs, la circulation des discours dans l’ « espace public » peut introduire des dynamiques conflictuelles qui participent en retour à sa configuration. Cette dimension polémique dans une dialectique discours/contre-discours est au cœur des problématiques liées à l’interdiscursivité (AMOSSY, 2014). A ce titre, discours médiatique, politique, publicitaire etc., sont pénétrés par des « discours transverses qui organisent les visées des énonciateurs multiples et les mondes sociaux auxquels ils se réfèrent » (TAVERNIER, NOYER, LEGAVRE, DELFORCE, 2010).

De plus, avec l’émergence du numérique, l’interdiscursivité trouve de nouveaux espaces et objets d’analyse. L’écriture numérique permet ainsi l’apparition d’une pluralité de discours autour d’un même objet. Celle-ci est liée à la multiplication des dispositifs médiatiques mais également permise par l’interaction avec le public dans ces nouveaux espaces de communication. Ainsi, par exemple, « différentes formes d’écritures numériques de l’espace socio-discursif contemporain, rattachées au journalisme professionnel et participatif où le traitement de faits d’actualité, objets de débats, donne lieu à des mises en scène numériques originales, explorant sur la même page plusieurs dispositifs communicationnels » (GARRIC et LONGHI, 2014). Le numérique oblige également à repenser la notion d’intertextualité, notamment en raison de l’émergence de l’hypertexte et, entre autres, de la lecture délinéarisée (VIGNAUX, 2001) et asynchrone. De même, il entraine de nouvelles perspectives d’analyse de l’interdiscursivité, les différents espaces qu’il offre étant souvent des lieux privilégiés d’expression de polémiques (AMOSSY et BURGER, 2011).

Autre entrée possible, interroger cette notion invite à se placer au niveau de la réception des productions discursives hétérogènes afin d’analyser leur interprétation et/ou reconfiguration (RICOEUR, 1985). Analyser les conditions de production et de réception de ces discours permet ainsi de saisir plus finement leur dimension dialogique. Dans ce cadre, l’intérêt peut aussi se porter sur la formation des opinions à la croisée des différents discours qui circulent dans l’ « espace public ». Des questions qui amènent à se pencher sur d’autres phénomènes et disciplines connexes telles que la sémiologie et de la sémiolinguistique.

Enfin, face à la pluralité des terrains de recherche possibles questionnant l’interdiscursivité, la dimension méthodologique s’avère cruciale : hétérogénéité des données, configurations plurielles de corpus (ouvert, fermé), différents outils épistémologiques etc., autant de questions qui méritent d’être soulevées.

D’autres axes de réflexion peuvent également être proposés dans le cadre de cette journée d’études, les différentes problématiques proposées ci-dessus n’étant que des exemples.

Axes de travail
Voici quelques exemples d’axes dans lesquels peuvent s’inscrire les différentes communications proposées. Ces axes ne sont publiés qu’à titre informatif, toute personne pouvant en proposer un autre, tant qu’il est en rapport avec la question de l’interdiscursivité.

• Intertextualité, interdiscursivité et intermédialité
• Nouveaux espaces médiatiques et interdiscursivité
• Mémoire et médias
• Interculturalité et interdiscursivité
• Interdiscursivité, controverses et espace public
• Interdiscursivité et discours politique

Modalités de participation
Les jeunes chercheurs souhaitant participer à cette journée d’étude, quelle que soit leur discipline, peuvent envoyer leur proposition de communication
avant le 29 octobre 2015 à l’adresse suivante :

Le résumé n’excèdera pas les 5000 signes (espaces compris) en Times New Roman 12. L’auteur précisera son nom, le titre de sa thèse, son statut et son rattachement institutionnel.
La sélection se fera fin novembre, les personnes retenues seront informées par email de leur participation.

Bibliographie indicative

Amossy R. (2014). Apologie de la polémique. Presses universitaires de France, 240 p.
Amossy R. et Burger M. (2011 ; dir.). « Polémiques médiatiques et journalistiques : le discours polémique en question(s) ». SEMEN, 31, pp. 7-204.
Bakhtine, M. (1970). La poétique de Dostoïevski. Points Seuil, 346 p.
Bakhtine, M. (1970). L’oeuvre de François Rabelais et la culture populaire au moyen âge et sous la Renaissance. Gallimard, 471 p.
Barthes R. (1973). Le plaisir du texte. Seuil, 105 p.
Charaudeau P. (2006). « La situation de communication comme lieu de conditionnement du surgissement interdiscursif ». En ligne : http://www.patrick-charaudeau.com/La-situation-de-communication.html [Consulté le 05/07/2015]
Kristeva J. (1969). Sīmeiōtikì: recherches pour une sémanalyse. Editions du Seuil, 379 p.
Garric N. et Longhi J. (2013). « Atteindre l’interdiscours par la circulation des discours et du sens ». Langage et Société, 144, pp. 65-83.
Garric N. et Longhi J. (2014). « L’événement numérique : une interdiscursivité plurisémiolinguistique ». Studii de lingvistica, 4, « Ecritures et genres numériques », pp. 51-74.
Longhi J. et Garric N. (2013). « Théoriser le genre pour déjouer ses frontières et construire le sens ». Pratiques : Théories et modèles du genre en confrontation, 157, pp.31-46
Moirand S. (2007). Les discours de la presse quotidienne. Observer, analyser, comprendre. Presses universitaires de France, 179 p.
Ricoeur P. (1985). Temps et récit 3 : Le temps raconté. Seuil, 533 p.
Tavernier A., Noyer J., Legavre J.-B. et Delforce B. (2010). Figures sociales des discours : le « discours » social en perspectives. Université Charles de Gaulle-Lille3, 247 p.
Vignaux, G. (2001), L’hypertexte. Qu’est-ce que l’hypertexte. Origines et histoire. En ligne : https://halshs.archives-ouvertes.fr/edutice-00000004/document, [Consulté le 05/07/2015].

Comité scientifique
Thomas Bihay, Elico, Université Lyon 2
Elmira Prmanova, Elico, Université Lyon 2
Mathias Valex, Elico, Université Lyon 2

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